Festival international des arts plastiques de Maharès : Un fonds constitué, un rêve qui devient réalité

La femme peintre - Mahares (Tunisie) / source : https://www.voyagevirtuel.info/

En matière de politique culturelle, et plus précisément en ce qui concerne les arts plastiques, la volonté du Comité culturel du Festival international des arts plastiques de Maharès a été clairement exprimée : la constitution d’un patrimoine artistique est une nécessité indiscutable.

 

Le pari ambitieux du comité directeur du festival de rendre l’art accessible au grand public, semble aujourd’hui gagné à la satisfaction de tout le monde.

  

Déjà, en 1997 à dix années de sa création, le festival ne cessait d’enregistrer des succès. Le rêve formulé par l’initiateur du projet, en l’occurrence Youssef Reqiq, est devenu une réalité qui s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui. Cette période de dix années voit à Maharès un extraordinaire développement de l’art.

 

De toutes les régions célébrées alors par les artistes, Maharès est l’une des plus importantes; elles est devenue le creuset où s’élaborent de nouvelles formes qui seront certainement à l’origine d’un art nouveau. D’après Hachmi Bibi, un enfant de Maharès et auteur de l’ouvrage Maharès, site stratégique, civilisation et art où il dit : Maharès fut nommée ainsi pour sa fonction protectrice et ceci depuis l’antiquité jusqu’à l’ère islamique et post-islamique.

 

Elle est surtout connue comme porte d’entrailles, un havre de paix pour toutes les nations. Avant JC, elle fut nommée «Maharès younga». Par la suite, elle fut nommée «Maharès Ali» en relation avec son fondateur «Ali Ben Salem El Bekri Alabite». Puis, elle fut nommée «La nouvelle Maharès» à l’époque de Moez Ibnou Badis en 411 de l’Hégire /1O50 JC).

 

De nos jours, nombreux sont encore les jeunes plasticiens, porteurs des mêmes inquiétudes et des mêmes espérances qui, malgré une large circulation des idées, continuent de s’expatrier pour des séjours plus ou moins prolongés en Europe, en quête d’un identique besoin de communication.

 

Aussi bien y trouvera-t-on des œuvres d’artistes nés en Tunisie et dans cette région à côté des œuvres de nombreux artistes étrangers ayant séjourné plusieurs fois à Maharès, des artistes qui ne souhaitent que revenir à chaque festival, et comme nous l’avions déjà dit, Paul Klee aurait fait la même chose s’il n’était pas mort. De même, y trouvera-t-on des œuvres fidèles à la tradition figurative à côté d’œuvres qui ont tantôt fait éclater celle-ci, pour substituer à un monde de lumière un monde de formes et de couleurs.

 

Notre prédiction à travers la presse de cette époque s’est révélée juste lorsque nous nous sommes basés sur les constatations étayées par les nombreux témoignages des lecteurs admirateurs et des responsables qui ont visité les œuvres des artistes venus nombreux à Maharès et qui ont peint et sculpté l’univers du monde. Une possibilité s’offrait alors à la ville de Maharès : proposer aux artistes invités d’abandonner chacun une œuvre ou plus pour la constitution d’un futur espace contemporain.

 

Présentée d’abord à Maharès, lieu des festivals annuels, au Festival international de la Zitouna de Kalaâ Al Kébira après celles organisées à Hammam Sousse dans le cadre des festivités du 7-Novembre, l’exposition se propose aujourd’hui, après vingt années d’existence, de montrer, d’une part, toute la richesse et la diversité de l’art au cours de toute cette période, d’autre part, l’importance de l’attrait exercé sur de nombreux artistes plasticiens pour les paysages et la lumière de Maharès.

 

C’est aux antipodes des paysages maghrébins que se situait l’effort novateur des artistes plasticiens de tous les courants artistiques qui gravitent plus ou moins autour d’un monde contemporain Ces échappées d’une région à l’autre, d’un pays à l’autre, vont bien à ces plasticiens maghrébiens profondément attachés à l’identité et à l’authenticité des terroirs maghrébins qu’ils donnent au public à contempler.

 

Un espace de libre expression

 

Youssef Reqiq ne veut pas faire de Maharès l’exemple d’un destin tragique ou de la vie d’un artiste maudit mais bien au contraire un hymne à la vie et à la création artistique. A ce peintre et homme de théâtre fondateur, profondément attaché à l’identité et à l’authenticité du terroir de Maharès qu’il nous donne à contempler, par la grâce de son talent doublé d’homme de théâtre, sublimé par une lumière tunisienne mais ô combien maghrébine.

 

A ce propos et selon leurs témoignages, les artistes ont trouvé une audience au sein d’un espace propice et attirant pour leur recherche et leur curiosité. C’est ainsi que l’effort de Youssef Reqiq s’est prioritairement orienté en direction de ces artistes. Mais outre sa manière de gérer, outre celle que lui donnaient encore ses charges, ses richesses, sa faveur, son crédit, ses bonnes manières d’organiser des colloques de haut niveau, de collaborer avec les organisateurs, il avait deux maximes qui attiraient une extrême soumission de la part des artistes et du public. Il se faisait aimer de ses admirateurs, et ils partageaient ensemble la bonne réussite.

 

Les premiers résultats étaient encourageants par l’intérêt porté par le public. Le critère de la réussite étant fixé à l’aune de la fidélisation d’un vrai public et dans l’intronisation du FIAP, un repère incontournable dans la vie de Maharès et les retombées ne sont que bénéfiques, non seulement sur l’ensemble du gouvernorat de Sfax mai aussi à l’échelle nationale et internationale.

 

Au-delà des différentes tendances artistiques, l’exposition «Les grands peintres maghrébins» initiée par le FIAP de Maharès et le festival des droits humains et des cultures du monde à l’Hay-les-Roses en France est de faire en sorte que les artistes maghrébins exposent leurs œuvres.

 

Aussi, faut-il que chacun comprenne que cette exposition est incontournable car elle est un lieu privilégié d’échanges et de découvertes.

 

Quelle est la philosophie de ce festival ? Comme le dit Georges Boukoff, directeur du festival des droits humains et des cultures du monde «l’idée d’un festival des droits humains et des cultures du monde s’est imposée. Ce festival sera une fête, mais aussi, et cela le distingue, un lieu de connaissance. Il aura pour mission de faciliter les rencontres avec ce qui nous est étranger et d’offrir aux artistes et aux citoyens, de toutes origines et de toutes conditions, des espaces de libre expression. L’interaction et l’interactivité entre publics, artistes et intellectuels , illustreront une nouvelle manière de vivre l’art et la culture, à l’opposé de celle que nous imposent le star-système, le show-business et la communication de masse».

 

Comme le dit aussi M. Guaino, commissaire au plan, dans sa préface à L’Univers des arts n°23 de mai 1997: «Il faut aller au salon, pour se convaincre qu’à l’intérieur de la civilisation matérielle, dont l’artiste est indissociable, même s’il ne peut vivre qu’en s’opposant à elle, il reste un espace pour ce qui élève l’homme au-dessus de lui-même et, à travers l’émotion singulière de l’œuvre, lui révèle sa part d’universel».

 

Ce festival a un grand rôle à jouer : grâce à lui, les artistes prouvent qu’ils existent, et le public que l’art est toujours bien vivant, témoigne de la pérennité d’un art qui ne craint pas d’évoquer la réalité, une réalité qui se pare aussi de rêve. Telle est d’ailleurs la création qui permet l’évasion vers un univers quelque peu réinventé en cette année 2009.

 

Ammar ALLALOUCHE (Artiste plasticien)

Source : la presse 15/09/2009    

 

 

Affiche 2007  / Source site Biba Trabucchi : http://www.bibiart.eu